Quelques nouvelles depuis un mois de silence. Il s’en est passé des choses, mais rien de bien palpitant, malheureusement…
J’ai pu enfin sortir du Blavet, le jour de faire une première sortie à la voile avec Øya est arrivé ! Les choses sérieuses approchent, je me suis trouvé un travail pour me faire une caisse de bord raisonnable, mais le Coronavirus m’a comme à tous coupé l’herbe sous le pied…
Une longue préparation
Même quand tout semble prêt, il reste toujours quelque chose à faire. C’est un peu ce qu’il s’est passé avant de quitter le Blavet. La liste des tâches que j’avais à faire n’était pas si longue, mais chaque élément demandait finalement du temps, beaucoup trop de temps.
Juste à titre d’exemple: j’ai remise ma gazinière en état de marche. C’est un modèle qui ne se fait plus depuis des années et le constructeur m’a répondu que, en bref, c’était peine perdu pour trouver toute information ou pièce. Une après midi de démontage, peinture anti-rouille là, une nuit dans l’odeur du solvant et une matinée de remontage.
Tout est comme ça.
Vers l’eau salée !
Un beau jour, enfin, tout est suffisamment prêt et je peux sortir de ma rivière. Pour cette occasion, j’ai eu la chance d’avoir la présence d’Arthur, le moniteur qui m’a formé pendant ma formation de moniteur. Partir faire une première sortie pour tester un bateau que je ne connais pas en solitaire aurait été bien, mais à deux, c’est beaucoup plus simple et plus sympa !
On est donc sortie de la rivière pour le mettre au port du Kernével, dans la rade de Lorient. Le convoyage fut au moteur, et deux surprises m’attendaient à l’arrivée: une bonne et une mauvaise. La mauvaise est que j’ai une fuite au niveau de l’injecteur du premier cylindre, la seconde est que les fonds d’Øya sont on ne peut plus secs.
C’est le sur-lendemain, le vendredi que nous avons eu les bonnes conditions pour enfin sortir faire quelques ronds dans l’eau.
Premières impression
C’est comme d’habitude
C’est la première réflexion que je me suis fait. Oui, Øya est un bateau normal. Je m’attendais à une sensation de lourdeur et d’inertie beaucoup plus forte et c’est bien le cas, mais beaucoup moins que ce à quoi je m’attendais.
Une stabilité à toute épreuve
Pendant notre sortie, nous avons très peu manœuvré. Nous sommes sortis de la rade, avons hissé la grand-voile et le génois et nous avons remonté la côté de l’île de Groix du sud vers le nord.
On a fait un long bord de près avec la barre amarrée. Seul, le bateau trace tout droit sans que l’on ait besoin de sortir toutes les 5 minutes. La plupart des bateaux en sont capables, mais sur Øya c’est d’autant plus simple. Il y avait un peu de mer, le bateau bouge peu presque comme si de rien n’était.
Pour les allures portantes il faudra bien sur que j’utilise le régulateur d’allure. Ça fera parti des choses que j’ai hâte d’apprendre.
Ajustements techniques
Cette première sortie a permis de voir un certain nombre de choses jusqu’ici moins flagrantes.
- Déjà les voiles sont plutôt en bon état, je craignais vraiment devoir en changer quelques unes très rapidement, mais elles ont encore des milles à faire.
- La gazinière par contre tient sur un rail que je n’arrive pas à maintenir en place, elle glisse donc dessus dangereusement. C’est un point urgent à traiter.
- La drosse de mon emmagasineur de génois a tendance à se bloquer, donc à ajuster.
- Un point assez crucial, mon compas de route n’indique pas le nord ! Mon bateau en acier a un champ magnétique trop fort qui fausse l’information. À voir comment je peux contourner cette déviation… Pour l’instant j’utilise le transpondeur AIS qui donne ma route fond, mais il faudra que je fasse ma courbe de déviation quoi qu’il en soit.
Du pèze, enfin !
Pour rappel la règle numéro 2 du projet consiste à travailler, comme décrit là. Le projet est relativement atypique est prend du temps à se mettre en place, ça ne veut pas dire que l’objectif change pour autant. Quand on a peu d’argent, trouver, acheter, préparer, mettre à l’eau un bateau est chronophage et ça demande des efforts et de la logistique. Il est difficile de faire autre chose à côté.
En fait, j’arrive à la fin de mon budget initial, comme prévu mais avec un peu d’avance. C’est plutôt satisfaisant car j’ai tout de même pu faire tout ça avec ce budget et les aides sociales. Maintenant que je n’ai plus la tête dans la peinture, ni un rond, alors je peux chercher le moyen de me faire une caisse de bord suffisante pour voyager un peu et ainsi commencer pour de bon !
La sailing valley
Pourquoi partir alors que le magot est juste en face ?
C’est ce que je me suis dit quand je suis arrivé au port du Kernével, qui se situe en face de « La Base » de Lorient. « La Base » est certes une ancienne base de sous-marins, mais c’est aussi et surtout devenu un pôle technologique de la course au large. D’ailleurs on l’appelle la sailing valley.
J’ai cherché des opportunités pour travailler en informatique ces derniers mois, mais ça n’a pas donné grand chose. Donc au lieu d’aller m’entraîner dans la baie de Quiberon, je me suis décidé de chercher du travail ici, en atelier. Contrairement à l’informatique qui offre plein d’opportunités sur du long terme, les travaux d’atelier coïncident très bien avec les petites missions de quelques semaines. C’est donc la meilleure option pour ma situation actuelle.
Ponçage de carbone
Après quelques échanges ici et là j’ai réussi à faire la rencontre d’une personne qui a pu me donner le contact d’une autre personne qui a une entreprise de haute technologie dans la course au large et qui « chercherait des roboticiens ». Une fois au téléphone il s’est avéré que c’était plutôt des techniciens d’atelier qu’ils cherchent. Pas grave, je prends tout !
Donc me voilà en combinaison de télétubbies blanc, gants étanches et masque à gaz, bref en ouvrier sous-qualifié à poncer des morceaux de carbone pour des bateaux qui vont courir le prochain Vendée Globe. La vie est pleine de surprises insoupçonnées ! C’est parfois très chiant mais souvent formidable. En tout cas de tout point de vue j’adore ce revirement de situation en quelques jours.
Tous les matins je pars travailler à pieds, quelques kilomètres le long de la rivière le ter. C’est sympa de marcher le long de l’eau, j’y vois quelques oiseaux, les bateaux et admire les couleurs changeantes de la pluie Bretone. Ça c’est le bon côté, car mon sentier longe aussi la route départementale…
Covid-19
Après une semaine et demi de travail, le confinement est décrété le 16 mars. Mon interprétation du discours d’Emmanuel Macron est qu’il me faudra aller travailler. Chef de moi-même, je signe mon attestation et je pars à pieds comme tous les matins au travail.
Changement de décors
Avec le confinement, le paysage a changé radicalement. Les voitures ont presque disparu alors que des dizaines de jogger sont apparus. Je marche le long de l’eau.
Les nuages se sont évaporés en laissant un ciel bleu magnifique. De son côté, la marée parait plus lente à respirer une mer d’huile que rien d’autre ne trouble que le sillage des oiseaux. Je me souviens de les avoir regardé mais je ne me souviens pas de les avoir entendu. Là, j’entends ce qu’il se passe au delà des abords immédiats, c’est comme si le film de la réalité dévoilait une profondeur inédite, comme désinhibé par l’absence du bruit de la circulation.
C’était beaucoup trop beau, beaucoup trop facile ! L’action eu lieu en deux temps:
- « Zut, je touche la poignée avec ma main »
- « Merde, en fait la porte est fermée »
Mon client a cessé son activité, donc je n’ai plus de travail. Le manque à gagner est grand, c’est plutôt frustrant.
Je repars alors longer le plan d’eau en essayant d’imaginer – entre deux joggers postillonnants – le paysage tel qu’il était avant. Avant les hangars de course au large, avant la route départementale, les bunkers nazi, les épaves et avant l’écume jaunâtre qui, si l’on continuait de s’arrêter finirait par se dissiper.
Il m’est interdit de sortir en mer car toutes les activités nautiques sont interdites.
Ce flou artistique ne me fait pas grand chose, ce qui compte c’est de sortir de cette crise au plus vite. Je comprends que la situation que je n’avais pas vraiment suivi est en fait grave. Je joue le jeu, je reste chez moi, je ne sors pas.
Cerise sur le gâteau
Depuis que j’ai commencé à travailler, la météo est devenue clémente pour sortir la semaine et pas terrible le week-end.
Ensuite et depuis le confinement, on traverse des fenêtres météo qui m’auraient permis de remonter vers le nord, si j’avais pu suivre mon plan initial de partir mi-mars.
En parallèle, j’étais sensé quitter ma place de port le 22 mars, mais comme je n’ai pas le droit d’en sortir je ne sais pas ce qu’il va se passer. Enfin si je vais devoir payer une nouvelle mensualité, 50% plus chère car on entre en mi-saison !
Et donc ?
Donc finalement, je ne suis pas sorti du port depuis que j’y suis entré, et je n’ai plus le droit d’en sortir.
C’est pas grave, je suis en bonne santé. J’ai du travail sur le bateau, donc je le fait.
Bravo Vincent pour ton blog!C’est passionnant et drôle à suivre ! Et ,oui, c’est vraiment pas de chance ce confinement surtout pour un marin avide de grands espaces ! Courage à toi sur ton bateau ! Bisous
Content de prendre de tes nouvelles et de te savoir en forme et pas démoralisé.
Super ce bateau, il convient parfaitement à ce que tu envisages et t’apportera tout plein de satisfaction. Il semble et doit être sécurisant pour fendre les vagues.
A bientôt au tel. j’ai rangé mon garage et trouvé des choses qui peuvent te convenir.
Bizzzzz