C’est la rentrée ! Entre frontières, COVID-19, argent, long terme et court terme c’était un peu la pagaille… Le repos des vacances a porté conseil: je pars pour l’Algarve au Portugal.

Que d’hésitations

C’est à Saint-Jean-de-Luz aux portes de l’Espagne que je me suis questionné sur l’avenir. Avant mon départ de Lorient, mon ambition était de visiter l’Espagne du nord puis revenir en Bretagne après deux semaines de vacances en famille. Le but étant de préparer le bateau pendant le mois de septembre pour une transatlantique.

On restera en Europe

J’aimerais bien traverser l’Océan un jour, mais il faut être réaliste: je ne suis pas prêt et le bateau non plus. En plus je n’ai même plus envie !

Hé oui ça pousse les cheveux !

Concernant Øya, je dois installer un moyen de récupérer la météo au large, c’est obligatoire pour la navigation hauturière mais surtout nécessaire. Il faudra aussi que je passe un coup d’antifouling sur la coque, les fenêtres météo du mois de janvier n’avaient pas permis de faire ça correctement… Donc c’est à refaire prématurément. Il y a aussi plein d’autres choses que j’aimerais faire.

Pour tout ça il faut de l’argent ! Or ma caisse de bord est presque vide, il me faut la remplir. Le travail que j’ai ne rapporte pas assez, il m’en faudrait un de plus, et puis ça me ferait du bien de refaire un peu d’informatique, j’adore toujours l’ingénierie et ça me manque.

Bref, ce vague projet de traverser l’Atlantique est bien mais il est trop tôt. On verra, peut-être un jour mais ce sera en tout cas plus tard.

Réorientation

Si on part sans objectif particulier on se retrouve vite comme une andouille à Saint-Jean-de-Luz sans trop savoir quoi faire…

En fait le timing n’est pas si mauvais que ça. Mon programme de l’été a plus été ponctué par les vacances en famille et entre amis que par mon programme de navigation et pas moins de vie. C’est le bon contexte pour imaginer les traits que prendra la suite.

Qu’est-ce que tu veux faire de ta vie, Vincent ?

Une ex

Construire c’est fabuleux… Mais que faire une fois la construction terminée ? Commencer quelque chose d’autre ?

Pour tout il faut une motivation. Arriver à concrétiser le projet m’a demandé tellement d’effort que cet objectif était devenu la motivation principale. Lorsque j’ai pris la décision de me lancer dans cette aventure, j’avais un rêve qui me semblait derrière une montagne de préparations. Or, depuis peu nous en sommes là: le projet est devenu réalité et je suis en quelque sorte déjà en haut de la première montagne. Il s’agit donc maintenant de recentrer le projet sur des objectifs enthousiasmants (et réalistes).

Je pars donc de mes envies : voyager, aller vers un autre climat, rencontrer des gens qui ont une culture différente et voir des paysages particuliers. J’ai beaucoup apprécié la Norvège, les Norvégiens, le climat et justement, c’était une expérience fabuleuse. J’ai envie de poursuivre ma route vers des horizons différents.

Après tout c’était bien ça l’idée de départ, emménager dans une maison qui me permette de voyager sans avoir à tout détruire pour tout recommencer. Sisyphe n’aura qu’à en prendre de la graine.

Partir pour l’Algarve

C’est décidé, j’irai au chaud passer l’hiver dans le port d’une ville sympa, où la culture culinaire est existante et où je trouverais un chantier pour Øya.
Bien.

On dit que le nord de l’Espagne -en particulier la Galice- ressemble beaucoup à la Bretagne. Le cidre est une spécialité de Gíjon en Asturie, c’est pour dire. J’adore la Bretagne mais ça fait longtemps qu’elle n’est plus dépaysante pour moi, en tout cas pas assez.
Je ne ferai que passer.

Le Portugal ? Pourquoi pas ! Il y a du vent et de la morue séchée des Lofoten, en plus les ports ont l’air financièrement accessibles. Tout le monde revient enchanté de la région du sud, ma décision est donc prise.
Je resterai cet hiver en Algarve.

La carte de la péninsule ibérique et de la france montrant mon point de départ (saint jean de luz) et d'arrivée (Algarve).
Départ de Saint-Jean-de-Luz, arrivée quelque part en Algarve

La fin des vacances

J’avais laissé Øya à Saint-Jean-De-Luz seule accrochée à sa bouée pendant les vacances. Ça me permet d’avoir l’esprit tranquille en mon absence. Ces bouées qu’on appelle des coffres sont effectivement peu chères et entretenues par le port qui garanti alors une certaine qualité.

Pas de bol

Nous revenions de la plage avec la famille, quand la Marine nationale m’appelle pour m’informer que le coffre a cédé. Øya s’est retrouvée à la dérive et commençait à entrer dans la zone de baignade de la baie. Sa destination finale aurait été au mieux de s’échouer avec élégance sur la plage au milieu des touristes mais pour ma part je l’imaginais déjà en train de se faire écraser contre les rochers par les rouleaux…

Bien heureusement les personnes qui étaient par chance sur leur bateau à côté ont pu appeler le sémaphore immédiatement et les marins sont venus remorquer Øya à temps jusqu’à un autre coffre avant que tout dégât puisse se produire. Ça valait bien la peine de prendre un coffre à 70€ la semaine si c’est pour qu’il casse. Bref, j’ai toujours une chance inouïe dans ma malchance, et ça me réjouit !

Øya m’attendait sagement dans la baie

Après une pause express à Toulouse où Louise m’a prêté son rendez-vous dentiste et un tartare avec ma cousine Morgane, je prends le bus pour Saint-Jean-De-Luz. Évidemment les horaires de bus ne sont pas en phase avec ceux de la marée. Il faudra que je sorte du port à la rame avec mon annexe pour rejoindre mon bateau qui est dans la baie, et le courant rentre beaucoup trop fort dans le port. Par chance, je tombe sur des Espagnols qui veulent bien me remorquer avec leur bateau à moteur. Sinon j’aurais passé la nuit sur le ponton.

Me voici alors de retour à bord avec la ferme intention de quitter cette région sans vent et le Golfe de Gascogne au plus vite. Øya est restée là plus d’un mois, vite, de l’air !

Le baptême du gros temps

Je fais quelques courses et prends la météo. Elle n’est pas très bonne mais elle n’est pas horrible non plus. On annonce un vent d’ouest à 6 Beaufort établi et rafales à 7 voire 8 Beaufort ; en français ça veut dire « des conditions un peu musclées ». Le vent étant contraire à ma route ce sont même des conditions « plutôt très inconfortables ».

J’en ai marre d’avoir une boule au ventre quand les prévisions ne sont pas parfaites, après une longue hésitation je me dis que de toute façon c’était l’occasion de voir le bateau dans des conditions plus fortes que d’habitude. Donc je pars.

L’après midi se déroule plutôt bien, le vent forcit petit à petit, j’adapte la surface de toile, tout va bien. La mer n’est pas si forte, on a une houle de 3m un peu hachée mais ça va vraiment. C’est entre 3H et 6H du matin que j’ai atteint les conditions les plus fortes avec parfois des rafales à 8 Beauforts. Dans ces moments là l’air est très salé et il n’y a plus aucune lumière alors que les étoiles et la lune quasi-pleine s’étaient montrées quelques minutes avant. La pluie et le vent font un vacarme impressionnant qui masque l’orage qui a quelques fois grondé non loin de là au dessus.

Tout se calme dans la matinée

Je mouille l’ancre à 12h42 à Getaria avec les yeux imbibés de sang et un sourire indécrochable ! Même si j’ai fait une performance lamentable – à savoir 25 miles nautiques parcourus sur quasi 24H – j’ai en quelque sorte fait mon baptême du feu.

C’était l’occasion idéale car il ne s’agissait pas du passage d’une dépression sur trois jours, il s’agissait de gros grains mais pendant quelques heures. La houle n’a pas eu le temps de se creuser à plus de 3 ou 4 mètres. C’était suffisant pour se rendre compte des difficultés que je pourrais rencontrer, imaginer ce que ça donnerait dans un véritable coup de vent et voir le comportement de mon bateau là-dedans.

Øya est extrêmement docile dans ces conditions. Je n’ai jamais ressenti la moindre insécurité. J’ai noté certains problèmes techniques, cependant:

  • L’axe du vit-de-mulet s’est délogé. Par chance c’est arrivé entre deux grains. J’ai failli y laisser une des phalanges de mon annulaire en remettant la bôme en place car la houle faisait bouger le bateau. J’aimerais faire un trou dans l’axe et y mettre une goupille pour que ça n’arrive plus jamais.
  • Il me faudrait une vraie lampe frontale étanche car dans le grain et dans la nuit il fait vraiment très sombre…
  • Ma salopette de ciré est de très mauvaise qualité, c’est une vraie passoire. C’est un détail important car le vêtement mouillé est très efficace pour anéantir la motivation, surtout quand il s’associe à la fatigue. Ça va que l’eau était à 20 degrés ou plus.

Mon seul regret est d’avoir vu ça de nuit, ça doit être magnifique de jour. Ce n’est pas au programme, c’est bien d’en avoir fait l’expérience mais il ne faut pas jouer.

Ça y est on avance !

Je suis parti le 28 Août de Saint-Jean-De-Luz, et souhaite rejoindre l’Algarve autour du milieu du mois d’octobre. J’ai mis mon état d’avancement sur la page d’accueil du blog, je la mettrais à jour au fur-et-à-mesure.

Le mouillage de Leiketo, inconfortable mais joli

À l’heure où je rédige cet article, je suis au mouillage en face de la « Playa de Rodiles », 11Mn avant Gijòn. Je repars tout à l’heure pour acheter un peu de matériel et boire une bolée de cidre à Gijòn.

Je suis enfin sorti de cette bulle de pétole qui s’étend d’Arcachon jusqu’à Santander, c’était mon premier objectif. Le prochain sera le cap Finistère, après l’avoir franchi je serai sous l’influence d’un autre système météo et je devrai trouver des vent portants vers le sud, jusqu’au Cap Saint-Vincent. Ensuite, il faudra que je choisisse un port d’atterrissage, pour l’instant je considère Portimão.

Je navigue parfois de jour, parfois de jour et de nuit en fonction des conditions. Je ne souhaite pas trop perdre de temps et arriver relativement tôt au Portugal car j’ai hâte de pouvoir me consacrer à mon auto-entreprise.

En attendant je profite de la route, des paysages magnifiques de la Cantabrie, des Asturies et bientôt de la Galice. Je ne perds pas de temps et pour autant je ne me prive pas du voyage.

Tiens d’ailleurs, si j’allais faire une randonnée quelque part avec ma tente ? Je ne sais pas, j’hésite… Est-ce vraiment ce que je veux ? Ha on verra plus tard !

À bientôt !